Alors que la France est à l’arrêt, Berlin avance méthodiquement sur l’hydrogène. Les pouvoirs publics ont arrêté une position claire sur les importations et le transport d’hydrogène.

Cet été, il n’y a pas eu de vacances pour l’hydrogène en Allemagne. Ainsi, le pays a eu le feu vert en juillet pour investir 4,6 milliards d’euros dans l’hydrogène au titre d’un IPCEI qui concerne au total 7 pays. Il s’agit du volet allemand de l’IPCEI Hy2Infra. Lequel couvre au total 23 projets dans le pays. Au global, avec l’aide des gouvernements régionaux, l’aide se monte à 7,9 milliards.

On peut identifier parmi les bénéficiaires des acteurs comme Enertrag, RWE, Thyssengas, mais aussi Air Liquide et Gasunie.  Ces projets vont permettre d’atteindre une capacité de production d’hydrogène pouvant aller jusqu’à 1,4 GW (alimentée par des énergies renouvelables), ainsi que l’équivalent de 370 GWh en matière de stockage d’hydrogène. RWE est l’un des grands gagnants avec l’usine d’électrolyseurs de Lingen et l’installation de stockage d’hydrogène d’Epe qui seront financés à hauteur de 619 millions d’euros. RWE est également impliqué dans un consortium développant une usine d’électrolyseurs de 100 MW dans le port de Rostock (Mecklembourg-Poméranie occidentale) dans le cadre du projet HyTechHafen Rostock.

L’IPCEI prévoit aussi une subvention de 72,5 millions d’euros à Hydrogenious LOHC Infra Bavaria (une filiale d’Hydrogenious LOHC Technologies), pour le projet Green Hydrogen@Blue Danube. Une usine va produire 1 800 tonnes d’hydrogène par an à partir de 2028, afin d’alimenter une zone industrielle. L’hydrogène sera stocké sous forme liquide selon le procédé LOHC (Liquid Organic Hydrogen Carrier).

Plus surprenant, on relève la présence de BMW dans les lauréats. La firme de Munich coche les cases dans trois catégories (mobilité, pile à combustible et stockage à bord d’hydrogène). C’est d’ailleurs le seul constructeur automobile à figurer dans ce nouveau programme.

Toujours au sein de cet IPCEI, on notera par ailleurs la construction de près 2 000 km de pipelines pour le transport de l’hydrogène, ce qui va permettre d’amorcer la dorsale européenne. L’énergéticien EnBW va consacrer 1 milliard d’euros pour démarrer un réseau de pipelines, qui est censé entrer en service en 2032. EnBW indique que 60 % du réseau de gaz pourra servir pour l’hydrogène. Et au total, ce sont 9 700 km de canalisations qui seront disponibles à cette échéance.

En juillet, le gouvernement fédéral a présenté sa stratégie en matière d’importation d’hydrogène vert et souhaite ainsi s’approvisionner auprès de plusieurs pays pour décarboner son industrie. La stratégie définit la provenance de l’hydrogène, la manière par laquelle ce commerce doit être organisé et certifié, et la façon dont les chaînes de transport sont construites à partir des ports et vers des pipelines. Selon Reuters, l’Allemagne s’attend à avoir besoin de 95 à 120 TWh d’hydrogène par an d’ici 2030 et de 360 à 500 TWh d’ici 2045 pour atteindre son objectif de neutralité climatique, les importations devant couvrir 50 à 70 % de ces besoins. On peut relever que la consommation d’énergie à base d’hydrogène de l’Allemagne en 2045 correspondrait à la demande totale d’électricité prévue du pays en 2030. Le gouvernement fédéral mise sur des coopérations internationales, par exemple avec la Norvège, le Danemark, l’Autriche, l’Italie ou encore le Canada et la Namibie. Des partenariats stratégiques avec l’Afrique du Sud, de l’Ouest et l’Australie sont par ailleurs la pierre angulaire du futur approvisionnement en hydrogène. Dans ces pays, les conditions se prêtent particulièrement à la production d’électricité éolienne et solaire pour la fabrication d’hydrogène.

Sur le site du ministère allemand de l’économie, on peut lire que ces importations vont démarrer dans trois ans. Sur la période 2027-2033, le pays souhaite importer 259 000 tonnes d’ammoniac. Un premier contrat a été attribué à la compagnie Fortiglobe, basée dans les Emirats, pour de l’hydrogène produit en Egypte.