Les SAF : un marché qui décolle
A commencer par Qair et Airbus. Le groupe spécialisé dans les énergies renouvelables et le leader mondial de l’aéronautique ont signé un protocole d’accord afin d’implanter en Occitanie une usine de production de carburants d’aviation durables. Elle sera implantée à Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées, selon la presse locale. L’Agence Régionale Energie Climat d’Occitanie (AREC) suit de près ce premier projet industriel majeur pour la région et des discussions de partenariats sont également en cours. C’est un projet d’un budget de 800 millions d’euros, avec des volumes de 70 000 tonnes par an. Qair et Airbus collaborent au développement d’un écosystème régional de SAF comme une première étape avant de développer des projets de production d’hydrogène renouvelable et d’e-fuel à l’échelle nationale. « Pour ce faire, Qair mise sur l’hydrogène renouvelable et le développement d’électrolyseurs sur tout le territoire français, en commençant par la région Occitanie où nous construirons bientôt un projet dédié aux e-SAF et où nous construisons dès aujourd’hui notre première unité de production d’hydrogène renouvelable Hyd’Occ », commente Olivier Astruc, directeur Hydrogène France chez Qair. Précisons que la région Occitanie, Airbus, ART, le pôle Aerospace Valley et l’aéroport de Toulouse-Blagnac avaient signé en janvier 2023 une déclaration « Initiative carburants d’aviation durables en Occitanie ». Les signataires visent des objectifs au moins deux fois plus ambitieux que ceux des mandats européens pour l’incorporation des CAD dans la région dès 2025.
Toujours en lien avec Airbus, Genvia, qui propose un électrolyseur à haute température, va produire de l’hydrogène bas carbone qui servira d’ingrédient pour élaborer des carburants durables pour l’aviation. L’accord prévoit d’évaluer plusieurs modes de production. Il y aura par exemple la production d’hydrogène à partir d’un électrolyseur de type SOEC (Solid Oxide Electrolyzer Cells) que Genvia développe, en alternative aux technologies PEM, mais aussi de gaz synthétique (syngas), combiné avec différentes sources de CO2. L’étude sera menée pendant la première moitié de l’année, avec le concours financier de la région Occitanie. Ces ingrédients serviront à produire du e-kérosène que souhaite utiliser Airbus. Les avions et hélicoptères du groupe peuvent utiliser ce type de carburant sous forme de mélange, à hauteur de 50%. L’objectif est de passer à un taux de 100% en 2030. Précisons au passage que les SAF permettent de réduire de 80% les émissions de CO2, par rapport aux carburants d’origine fossile. Selon l’IATA, pas moins de 100 millions de tonnes d’hydrogène seront nécessaires d’ici 2050 pour aider à produire des carburants durables pour l’aviation. La région Occitanie explorera aussi, en fonction des résultats de l’étude, et avec Genvia et Airbus, les possibilités d’implanter une usine de production de SAF sur le territoire.
Pour sa part, Lhyfe va se lancer dans les SAF au Havre avec un consortium canadien. À Hyvolution, le producteur a signé un protocole d’accord avec le Groupe International SAF+, chef de file mondial de l’énergie propre pour l’aviation, et basé à Montréal. Il rassemble une coalition d’acteurs internationaux de premier plan et issus de l’ensemble de la chaîne de valeur de l’aviation, dont par exemple le Groupe Air France-KLM (pour l’approvisionnement de carburant e-SAF de seconde génération, avec de premières livraisons qui sont prévues d’ici 2030), ou encore Airbus. Ce groupement utilise des matières premières disponibles et des énergies renouvelables – conformément à la réglementation internationale et européenne (CORSIA et RefuelEU). Dans le cadre du protocole d’accord annoncé à Hyvolution, Lhyfe et SAF+ prévoient une implantation dans la région portuaire du Havre. Dans le détail, Lhyfe construirait un site de production d’hydrogène renouvelable d’une capacité de plus de 100 tonnes / jour (300 MW de capacité d’électrolyse installée), afin d’alimenter un site de production de e-SAF que son partenaire canadien envisage de construire. Cet ensemble industriel serait connecté au réseau de transport d’hydrocarbures, afin d’acheminer les carburants durables d’aviation depuis Le Havre jusqu’aux aéroports de la région parisienne, ainsi que du Nord et de l’Est de la France via les infrastructures existantes. Les deux partenaires visent un début de commercialisation à horizon 2030.
Enfin, Elyse Energy et l’aéroport de Bordeaux-Mérignac vont collaborer autour des carburants durables. Cette association en Nouvelle-Aquitaine était assez naturelle. Dès 2022, l’aéroport de Bordeaux-Mérignac était le premier aéroport commercial français de plus d’un million de passagers à proposer de façon permanente du carburant aérien durable, à un taux d’incorporation de 30%. Non loin de là, sur le bassin de Lacq (Pyrénées-Atlantiques), Elyse Energy va implanter une usine pour produire du kérosène à partir d’électricité nucléaire et renouvelable, et de biomasse. Le producteur sera en mesure de délivrer 75.000 tonnes par an de e-biocarburant dès 2028. Les synergies entre les deux acteurs étaient donc évidentes. « Avec le projet de BioTJet porté par Elyse Energy, et ses partenaires Avril, Axens et l’IFPen sur le bassin de Lacq, il nous semblait naturel d’unir nos forces pour travailler conjointement aux modalités de fourniture de e-biokérosène sur la plateforme aéroportuaire de Bordeaux-Mérignac », commente Pascal Pénicaud, Président d’Elyse Energy. Les deux partenaires vont étudier les volumes de CAD nécessaires aux besoins de l’aéroport de Bordeaux. Il s’agira ensuite de concevoir des contrats d’achat et de distribution, de mettre en place l’approvisionnement nécessaire au niveau régional et l’avitaillement. Elyse Energy et l’aéroport de Bordeaux essaieront également de développer cette filière régionale en y associant de nouveaux acteurs.